Hezbollah : en cas de guerre totale, les Israéliens passeraient "des semaines dans les abris"


17 juin 2024

"Le Hezbollah donne l'impression de ne pas vouloir que les choses basculent, le Liban est contre la guerre. La décision d'une guerre totale serait israélienne"

Le 10 octobre, trois jours après l'assaut du Hamas dans le sud d'Israël et alors que tout le pays était dans un état de sidération inédit, le Commandement du front intérieur prenait la parole, enjoignant les Israéliens à prévoir des stocks de nourriture, de batteries de téléphone, d'eau, des lampes de poche et des radios afin de se préparer à "passer 72 heures dans les abris sans électricité ni eau courante". La guerre totale se préparait et le Hezbollah menaçait d'attaquer Israël pour défendre son petit frère du sud, le Hamas. Ou plutôt, Israël se préparait à attaquer le Sud-Liban pour stopper dans son élan les velléités du proxy de l'Iran, et le Hezbollah allait répondre durement. 

En Israël, on dit que tant que le groupe chiite ne vise pas Tel Aviv, le jeu continue à ressembler à celui du chat et de la souris

"Le Hezbollah donne l'impression de ne pas vouloir que les choses basculent, le Liban est contre la guerre, et Téhéran ne semble pas leur donner l'ordre de l'escalade. La décision d'une guerre totale serait donc israélienne", explique Raphaël Jerusalmy, ancien officier du renseignement militaire israélien.

 "Si l'échelon militaire est prêt, l'échelon politique n'a encore rien décidé. Une guerre aurait un impact significatif sur l'économie israélienne, signifierait que les civils seraient dans les abris pendant des semaines". 

Le Hezbollah promet de cesser les hostilités "lorsque l'agression sioniste s'arrêtera à Gaza". Israël lui, qui craint qu'un 7 octobre ne se reproduise à ses frontières nord, exige le retrait du groupe chiite à plus de 10 kilomètres au sud du Litani. Malgré l'implication des États-Unis et de la France, les négociations semblent actuellement dans l'impasse.

Les Israéliens ont déjà vidé leurs supermarchés trois fois depuis le 7 octobre. Ils ont peur et pour cause...  "L'arsenal du Hezbollah est phénoménal", alerte Raphaël Jerusalmy, expert en sécurité. "Il compte 150 000 roquettes et missiles de toutes portées, ainsi que des drones suicides explosifs fournis par l'Iran. Leur nombre, mais aussi celui des rampes de lancement permettant des tirs de salves importantes, et leur déploiement au Sud-Liban et en Syrie, offrent au Hezbollah une capacité de frappe redoutable."

Selon les estimations, le groupe chiite pourrait tirer de 70 à 100 projectiles par salve, avec un rythme pouvant atteindre 1000 missiles par jour

"Même avec une efficacité de 95% du Dôme de Fer, sur 1000 missiles, 50 passeraient entre les mailles du filet et pourraient toucher des cibles stratégiques", précise Raphaël Jerusalmy. De Tel Aviv à Jérusalem, en passant par Beer Sheva, aucune région du pays n'est à l'abri des missiles du Hezbollah.

"Après des mois à tirer sur Israël, le Hezbollah a appris à percer les défenses. Plus le temps passe, plus il perfectionne ses tactiques", souligne Raphaël Jerusalmy. Si Israël peut compter sur l'absence de défense aérienne côté libanais et sa capacité à détruire rapidement les rampes de lancement ennemies, le Hezbollah dispose de réserves lui permettant de maintenir un rythme effréné de tirs pendant trois mois de guerre.