11 décembre 2024
Manifestation de la communauté juive à Marseille contre l’antisémitisme en juin dernier
Depuis le 7 octobre, les actes antisémites ont explosé en France. Des manifestations appelant à la mort des juifs paradent dans les rues de Paris et de province et des tags insultants fleurissent sur les murs. Un climat très difficile pour les Français de confession juive, au point de se poser la question si leur place est toujours en France. Témoignages à Marseille.
L’antisémitisme est la première cause des atteintes aux personnes et aux biens* alors que les juifs représentent moins d’1% de la population française. Certains ont même enlevé leur mezouza à l’entrée (objet spirituel qui sert à protéger l’habitation) par peur d’une agression.
Et depuis plus d’un an maintenant, de nombreuses attaques antisémites ont été recensés en France : synagogue incendiée à Rouen, attaque terroriste contre la synagogue de la Grande Motte, tag à la gloire d’Hitler dans un immeuble du 5ème arrondissement de Marseille ou encore le viol sur une jeune fille juive de 12 ans à Courbevoie « pour venger la Palestine ». Les chiffres sont éloquents : + 192 % d’actes antisémites au cours du premier semestre 2024, par rapport à la même période en 2023 selon la direction nationale du renseignement territoire.
La crainte d’être juif à Marseille
« On a peur de montrer nos signes d’appartenances religieuses, notamment à cause de la montée de certains politiques qui montrent un soutien sans équivoque au Hamas » déplore Sandrine**. Elle qui emmène tous les jours ses enfants à l’école, se questionne en voyant des militaires et policiers devant protéger les établissements scolaires de confessions juives : « Je suis obligé de dire à mes enfants de ne pas parler trop fort d’Israël ou de prononcer le mot juif dans la rue par peur, comment en est-t-on arrivé là ? combien de temps cela va-t-il encore durer ? » souffle la jeune femme de 40 ans.
De nombreux actes antisémites isolés
Sans compter tout ce qui n’est pas médiatisé ou peu : les agressions physiques dans les rues, des tags sur les murs appelant à la mort des juifs, vandalisation de statut de personnalités juives, les slogans scandés pendant des manifestations en France mais aussi les commentaires sur les réseaux sociaux sur des contenus en rapport avec Israël et/ou les juifs.
Depuis le 7 octobre, c’est 30 000 Juifs qui ont posé leur valise définitivement et des centaines à y être aller temporairement avant de peut-être y rester par la suite. « Je pense à faire mon alyah à terme mais tant qu’on est là il faut continuer à se battre et lutter contre l’antisémite » insiste la mère de 4 enfants.
Un départ inévitable
Si certains pensent à partir à long terme, d’autres ont déjà pris leurs décisions. Lisa**, 23 ans est parti en octobre dernier pour un an minimum dans le cadre de ses études : « J’avais l’impression d’avoir de moins en moins ma place en France. La montée de l’antisémitisme est de plus en plus importante et de plus en plus décomplexée. » regrette la jeune fille. « Je me sens mieux sous les roquettes en Israël qu’en France, c’est assez révélateur de ce qu’on ressent... ».
Mickael**, 22 ans, travaille dans l’immobilier. Il ne se fait guère d’illusion, son départ est déjà acté à court terme. « Pour nous juif en France, on a plus d’avenir » déplore-t-il. Si le manque de sécurité se fait ressentir, ce n’est pas seulement lié aux actes antisémites mais aussi à cause de la justice française : « Il y a eu trop de laisser-aller, très souvent il y a des actes antisémites, des tags nazis où vivent des juifs ou à leur travail et rien n’est fait pour punir ses comportements » visant le manque de sévérité de la justice française…
*sont comptabilisés les actes ayant fait l'objet d'une procédure judiciaire ou policière
Sources : ministère de l’Intérieur, Service de protection de la communauté juive, institutions communautaires par l’Express
**les prénoms ont été modifiés
Jordan TOUATI